initiation à l'épigraphie grecque par Claire Tuan, l'hymne d'Athénaios.
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une partition de musique vocale : 

l'hymne d'Athénaios.

Pour vous présenter un passage de cet hymne, j'ai dû d'abord me plonger dans les écrits d'Annie Bélis.
Je vous invite à aller sur le site de l'ensemble de musique Kerylos qu'elle a fondé,
et à vous imprégner de cette ambiance musicale si différente de la nôtre.

Voici où se trouvait l'inscription, sur le mur sud du trésor des Athéniens,
avant son transport au musée de Delphes :

HymnAthVue.jpg

L'importance et l'extrême rareté d'une telle inscription
justifiaient amplement qu'elle soit mise à l'abri dans le musée.

Voici ensuite la photo que j'en ai prise dans le musée.
Je l'ai coupée afin de ne vous présenter
que la deuxième strophe (la mieux conservée) de l'hymne,
ce qui rendra je l'espère mes explications plus concises :

hymApo.jpg
CID III,1, 128 av. J.C.

 Fac simile de ce même passage (avec l'aimable permission de Mme Annie Bélis) :

facsimHymAthCID.jpg
CEFAEL, CID III

Naviguons tout d'abord entre les deux images ci-dessus : la photo et le fac simile.
On distingue bien les lignes du texte, et au dessus de chaque ligne, des lettres.
Et parmi ces dernières, deux sont retournées comme si elles se miraient dans l'eau :
l'ôméga et le psi, donc les deux dernières lettres de l'alphabet.
Premier mystère, dont je tâcherai de vous donner ultérieurement l'explication.

 la transcription
 va nous réserver un autre étonnement :

hymne.gif

Tiens, pourquoi ces voyelles ou ces diphtongues que j'ai écrites en bleu sont-elles doublées ?
On pourrait penser que c'est pour allonger leur durée pendant le chant.
Mais en réalité c'est tout le contraire :
il se trouve que la métrique de cet hymne nécessitait de très nombreuses syllabes brèves,
et cette notation répétée signalait qu'il fallait prononcer deux brèves au lieu d'une longue.
Et quand une diphtongue a été dissociée en deux parties écrites différemment (en vert),
c'était dans le même but : pour prononcer deux brèves.


Traduction par A. Bélis :

 "Voici l'Attique, la glorieuse, la grande cité qui, grâce aux prières de la guerrière Tritonide,
habite un sol à l'abri de toute atteinte.
Et, sur les saints autels, Héphaïstos consume les cuisses des jeunes taureaux ;
et, pendant que vers l'Olympe s'élève la vapeur d'Arabie,
 le clair lotus au son frémissant fait entendre son chant aux phrasés changeants,
et la cithare d'or, de sa belle voix, répond à la voix des hymnes".

Si on "lit" ce qui s'exprime ici de façon poétique,
cet hymne a été chanté en choeur par une ambassade religieuse athénienne
qui venait tous les huit ans en procession d'Athènes à Delphes.
Elle était composée des membres d'une association de musiciens, les technites dionysiaques.


Passons maintenant à l'étape suivante :

le système de notation musicale qu'utilisaient les Grecs anciens.

En réalité il existait deux systèmes de notation : un pour les instruments, et un autre pour la musique vocale.
C'est la notation vocale qui a été utilisée pour l'hymne d'Athénaios.
Plus simple à comprendre, elle nous réserve quand même des surprises.
Les 24 lettres de l'alphabet lui servaient pour noter des tons allant d'un sol au fa qui pour nous se trouve 8 tons plus bas.
24 signes pour à peine plus qu'un "octave", c'est beaucoup !
Car non seulement les demi-tons, mais également les quarts de tons étaient distingués.
 Et d'autres signes permettaient de noter les tons plus aigus ou plus graves que cette "échelle" principale.

J'ai fait correspondre ci-dessous les notes antiques (sur la ligne du haut)
et les nôtres, dans la portée, mais seulement celles qui ont été utilisées dans l'hymne d'Apollon.

gam1.jpg

Vous remarquerez tout de suite à la vue de ce diagramme que la "gamme" se lisait en descendant.
Vous voyez aussi que les deux dernières lettres de l'alphabet, le psi et l'ôméga,
s'utilisaient renversées pour noter les deux tons qui étaient juste un peu plus aigus que l'alpha.
Vous observez enfin plusieurs "vides" : ainsi les notes delta, epsilon, dzêta, êta,
qui se situent donc entre notre fa et notre mi bémol,
n'ont pas été utilisées dans la strophe en question,
et vous pouvez le vérifier en vous reportant à la photo de la pierre ou au fac simile.
De même pour l'alpha, et pour les autres vides.

Vous voici maintenant prêts à lire la double partition de cette strophe,
que je reproduis ci-dessous avec l'aimable autorisation de Mme Annie Bélis :

notaAntikStr2CID.jpg
Cefael, CID III. ©

partiAthStr2.jpg
CEFAEL, CID III. ©


Pour vous permettre d'entendre la mélodie de cette strophe de l'hymne,
j'ai fait appel à trois musiciens de mon entourage proche,
que je remercie pour leur participation :

- au violon, Zung Pham :

- au clavier, Nao Matsuda :

- à la guitare, Vu Ngoc San :

- et en trio de violon, clavier et guitare :



Après cette entrée en matière,
 allons voir du côté des autres artistes qui se sont produits à Delphes.

Et si cette musique si ancienne vous a plu, allez écouter les improvisations
du musicien Hervé Fouéré sur le thème de la Grèce antique,
c'est là.

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